Habiter, c’est déjà mettre une danse au monde

Une ancienne église, une immense galerie, un studio dans l’antre de la place des arts… ce sont là quelques exemples de « résidences secondaires » qu’habitent les chorégraphes sdf — sans studio fixe — pour créer. La danse a toujours été une affaire de corps, d’espace et de temps. La résidence, c’est déjà le début – et souvent le milieu et la touche finale – d’une œuvre.

 

Résider pour créer

C’est qu’ont récemment fait Jacques-Poulin Denis à Circuit-Est, Dana Michel à l’Usine C, Lina Cruz au Centre de création O Vertigo (CCOV) puis à l’Agora de la danse (au Wilder), le collectif La Tresse d’abord  à l’Arsenal (à l’invitation de Danse Danse) et ensuite au CCOV. Et ce n’est là qu’un aperçu de quelques semaines du calendrier des « maisons » qui sont de plus en plus nombreuses à accueillir des artistes en résidence, notamment avec la transformation du CCOV et l’ouverture du Wilder. Bref, la résidence c’est le nerf de la création.

Jacques Poulin-Denis (The Runnng Piece) /© Xavier Curnillon En résidence

Jacques Poulin-Denis (The Runnng Piece) / © Xavier Curnillon (En recherche)

La fabrique de la danse

Pas de spectacle cette semaine à l’Agora de la danse? Et pourtant ça ne dérougit pas… La fabrique de la création continue de tourner. Lina Cruz vient à peine de conclure son spectacle que la jeune Daina Ashbee profite d’une semaine de résidence technique avant la présentation de WHEN THE ICE MELTS, WILL WE DRINK THE WATER? Point d’orgue nécessaire puisque sa diffusion au offta 2016 s’est faite sans plan technique élaboré, faute de temps et de moyens… Au même moment, 3 étages plus haut, le chorégraphe français Emmanuel Eggermont met la touche finale à Polis, pièce justement inspirée des villes où la compagnie L’Anthracite a été accueillie en résidence, et qui connaîtra sa première le 30 mars prochain à Roubaix en France.

Geneviève Robitaille / Tic-Tac Party

Geneviève Robitaille / Tic-Tac Party / Lina Cruz / © Mishô

« Les résidences nous ont permis d’établir un protocole de travail, explique Emmanuel Eggermont. À chaque fois qu’on arrive dans une ville d’accueil, on rencontre quelqu’un qui nous fait découvrir la ville autrement qu’en touristes. On arrive ici sur la fin du processus : il faut rester ouverts à ce que la ville peut nous apporter mais en même temps on commence à organiser la pièce. »

© L’Anthracite – Emmanuel Eggermont

Emmanuel Eggermont © L’Anthracite

Circuit-Est et les autres

Au Centre chorégraphique Circuit-Est, pour qui le service aux artistes est une mission en soi, il y aura eu en 2016-17 l’équivalent de 15 semaines de résidence pour les artistes locaux et 6 semaines dans le cadre des échanges internationaux. Au CCOV, qui en fait aussi sa mission, le format va de la résidence plus courte (sur un weekend), à la moyenne (1 à 2 semaines) ou la longue durée (étalée sur deux ans). Au théâtre La Chapelle, c’est 8 à 10 semaines qui y sont consacrées en moyenne chaque saison. La chorégraphe Helen Simard en a profité pour travailler sa pièce Idiot. Dana Michel a pu compter sur l’Usine C pour créer Mercurial George. L’Agora de la danse et à Tangente offrent des résidences toutes les semaines de l’année depuis l’emménagement au Wilder.

 

«C’est une expérience essentielle, confiait Lina Cruz au lendemain de sa première à propos du temps donné par l’Agora après celui offert par le CCOV. Ça permet aussi de s’adapter à différents espaces.» Bref, de rendre les œuvres encore plus vivantes.

 

Par Frédérique Doyon