Pour la pièce ON, José Navas rend hommage aux collaborateurs Marc Parent (concepteur d’éclairages) et Alexander MacSween (compositeur) qui ont marqué son virage esthétique vers le mouvement pur dans les années 2000, en reprenant des extraits de Portables Dances (2004), Anatomies (2006) et le solo Calm Abiding (2006) dansé par Nova Bhattacharya jamais vu à Montréal. José Navas crée aussi des partitions chorégraphiques nouvelles et donne une carte blanche à l’artiste-illustrateur Lino. Le blogue de l’Agora a invité ces collaborateurs à renverser l’hommage en livrant des témoignages et des fragments de leur création qui évoquent leur parcours avec le chorégraphe.
— Frédérique Doyon, commissaire invitée de l’Agora.

José Navas © Svetla Antonasova

José Navas en répétition pour On à l’Agora de la danse © Svetla Atanasova

Marc Parent : la lumière

« Quand j’ai commencé à travailler avec José, il faisait des choses très théâtrales, avec des scénos élaborées, des gros plans d’éclairages et beaucoup de choses à gérer. C’était difficile à tourner. À un moment donné, il s’est tanné et il m’a dit : le prochain show il va s’appeler Portable Dances, ça va se transporter n’importe où et ça va être simple… Depuis ce temps on fait des blagues avec ça : ça va être simple. Bien sûr, ça s’est complexifié en cours de route. Mais il y avait seulement 30 projecteurs [c’est généralement plus autour de 100 pour les productions de danse contemporaine]. Il y a eu vraiment une rupture dans l’esthétique de José et c’est une chose que j’adore en danse : il n’y avait plus d’anecdote ou d’histoire, c’était du mouvement pur. Abstrait comme la musique. Pour la lumière, tu te laisses inspirer par ça aussi, comment faire sortir les lignes, les émotions aussi, mais sans jamais imposer un seul sens. C’est là que notre relation s’est approfondie. »

On ©Nina Konjini

On José, Sonya, Marc / © Nina Konjini

«Vampiriser» la danse pour imaginer la lumière

« Il y a une esthétique des éclairages de Marc Parent avec José Navas, comme il y en a une avec tout le monde avec qui je travaille. Je suis comme un vampire : j’absorbe l’artiste et c’est lui qui me donne mes idées. Je regarde son travail, je vois où il veut aller avec ça et j’essaie d’aller au même endroit que lui. Une chose importante pour José : il me laisse carte blanche. Je me laisse inspirer par ce que je vois en répétition. L’éclairage vient interpréter la danse ; on a accès à la danse en grande partie par le visuel et la façon dont la lumière arrive sur les corps ou la scène, ça donne un angle de vue. »

 

Un espace qui permet le jeu des couleurs

« Depuis Portable Dances, le tapis de danse gris est la constante chez José. Le noir sur une scène, c’est la neutralité totale. Le tapis gris impose un lieu précis, tu sens le carré peu importe ce que tu fais. Et il reflète la lumière, il éclaire par en dessous ça influence beaucoup la composition. J’ai tendance à laisser tout cet espace vivant, même si l’accent est mis à un endroit plus précis. Aussi, le tapis gris capte la couleur beaucoup mieux qu’un tapis blanc, qui rend les couleurs un peu pastel. Tu peux le mettre bleu, rouge, il rend mieux la couleur de la lumière. »

 

Collaborateur de José Navas depuis le milieu des années 1990, Marc Parent est concepteur d’éclairages depuis plus de trente ans, d’abord en danse contemporaine, et pour le théâtre. Il a reçu le Dora Mavor Moore award 2013 pour  »Oustanding ligthing design in dance » du Toronto Alliance for Performing Arts. Il est présentement concepteur en résidence pour Les Grands Ballets Canadiens de Montréal.

 

Alexander MacSween : les voix de José

Alexander MacSween © Svlta Anatanosva

Alexander MacSween © Svelta Anatanosva

 

« Voici un court extrait de Solo With Light [solo de Portable Dances], fait entièrement avec la voix de José. Un de mes moments préférés de toutes les compositions que j’ai faites pour lui. »

Souvenir cubain

« Ce qui me revient en tête quand je pense à José Navas est une chanson de Pablo Milanes, chanteur Cubain que José aimait dans sa jeunesse au Venezuela. Lors d’une visite à Cuba dans les années 1980, mon père avait reçu plusieurs cassettes de musique en cadeau. Il me les a données vingt ans plus tard et je les ai écoutées par la suite un peu au hasard dans ma voiture, une Toyota Corolla presqu’aussi vielle que les cassettes. Un jour, en donnant un lift à José, suite à une répétition, j’ai allumé le système de son dans la voiture et cet album s’est mis à jouer. Notre discussion fut tout de suite interrompue par un cri de José : “Its Pablo Milanes! How come you have this in your car?” J’ai expliqué la provenance de la cassette et il m’a raconté que c’était un chanteur très important pour lui et ses amis à une certaine époque. Depuis, je ne peux pas écouter l’album sans penser à ce moment, et à ce que cette musique aura apporté au jeune José et à sa gang d’amis. »

Alexander MacSween collabore avec José Navas depuis 2001. Musicien, compositeur et artiste sonore, il a participé à de nombreux projets de danse, théâtre et cinéma, notamment avec Marie Brassard, Brigitte Haentjens, Robert Lepage. À titre de musicien, il a entre autres joué avec Tim Berne, Michel F Côté, Bionic, The Nils, et Sam Shalabi.

 

 Lino : une image vaut mille mots

L’image qui a cristallisé ses premiers échanges artistiques avec José Navas pour « ON ».

L’image qui a cristallisé les premiers échanges artistiques entre Lino et José Navas pour « On ».

« Ces images ont été captées pendant les premières expérimentations de mon travail avec José pour «ON». J’explorais alors un nouveau médium, un mélange peinture et vidéo. Cette exploration vidéo n’a pas été retenue pour ON. La raison étant que la chorégraphie a évoluée dans une autre direction. » — Lino

 

Artiste interdisciplinaire, peintre, illustrateur, auteur de romans graphiques, scénographe et concepteur multimédia, Lino a collaboré pour la première fois avec José Navas à la création du ballet Giselle pour Ballet BC à Vancouver en 2013. Une rencontre artistique choc que Navas a souhaité rééditer, comme une ouverture sur l’avenir.

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